ODETTE CAMP (1909-1979)
Notice biographique, par Michel Solis
Odette Camp est née à Marseille le 19 mars 1909. Ses parents, d’origine protestante, Victor Camp et Lucile Guilhon, s’installèrent à Paris en 1912. Par amour de cette ville, elle y demeura toute sa vie. Après avoir fait ses études secondaires en internat au Lycée Victor Duruy, elle étudia quatre ans à l’Ecole Nationale des Arts Décoratifs et à l’Ecole Nationale des Beaux-Arts, ainsi qu’à l’atelier du peintre Jean Despujols.
En 1928, elle épouse un jeune Grand Prix de Rome de musique qui deviendra le compositeur et chef d’orchestre Henri Tomasi dont elle sera la fidèle collaboratrice. Jusqu’à la mort de celui-ci (le 13 janvier 1971), sa vie se partagea donc entre le monde musical et son propre travail artistique. Bien que dévouant d’abord sa vie à la carrière du compositeur, elle ne cessa d’exposer régulièrement à partir de 1930.
Ce fut d’abord en tant que peintre, et sous le pseudonyme de « Otomasi ». Ses peintures à l’huile, au couteau, très colorées, figuratives, étaient alors inspirées par des sujets méridionaux, Provence et Corse. Elle exposait régulièrement, au « Salon d’Automne », à la « Société des Amis du Louvre », aux « Indépendants », à la « Société Nationale des Beaux-Arts » et plusieurs de ses toiles furent acquises par l’Etat, la Ville de Marseille et même certaines personnalités, comme Jean Gabin. Avant la 2è guerre mondiale, elle est l’un des exposants de La Galerie Carmine, rue de Seine à Paris, en compagnie de peintres de l’Ecole de Paris devenus célèbres : Brayer, Douking, Othon Friesz, Poliakoff. Une 1 ère exposition personnelle eut lieu à Marseille en février 1942 à la Galerie Saint Fé.
En 1947, elle décida de reprendre son nom d’Odette Camp. Cette plus grande affirmation d’elle-même correspondit à un changement de style, plus libre, moins académique, ainsi qu’à des changement de sujets et d’ambiances : c’est Paris, la Bretagne, les « grisailles », les « marines » qui l’inspirent alors, et ses toiles font songer à Marquet. Durant cette période, qui dure jusqu’en 1955, outre des décors pour l’opéra de son mari « L’Atlantide » (à Vichy, puis Lyon), plusieurs expositions personnelles à Paris recueillent d’élogieuses critiques : Galerie Barbedienne, avenue F. Roosevelt (1949), Galerie Serret, rue du Faubourg St-Honoré (1952), Galerie Cazelles (1954), également rue du Faubourg St-Honoré.
La remarque d’un ami, « ton dessin n’est pas assez poussé », est aussitôt relevée par Odette Camp comme un défi, et en 1958, une nouvelle exposition parisienne, à la Galerie Michel, Quai St-Michel, rassemble autant de dessins que de peintures. C’est désormais en tant que dessinateur qu’elle va s’accomplir comme artiste. En 1960, la Galerie Motte, rue Bonaparte, puis à Genève en 1966, consacre son nouveau talent, révélant un maître de l’encre de Chine, en même temps qu’un témoin précieux du « Vieux Paris » ; l’écrivain Thyde Monnier en a témoigné dans un beau texte. D’autres sujets, Venise, Ibiza, sont traités à l’encre de Chine, mais rehaussés de gouache, se nuancent encore de couleurs.
Son œuvre va ensuite progressivement s’assombrir, ses dessins sur Paris être dépouillés de tout personnage, et sa fascination pour les arbres à nu, les souches, les racines, donner vie à des formes puissantes, angoissées, insolites. En 1962 et en 1967, elle est présente dans des expositions de groupe à la Galerie Marcel Bernheim, rue La Boétie. Elle continua également à participer à de nombreux salons : « Société de l’Ecole Française », (1961), « Terres Latines » (de 1962 à 1966), « Le Club International Féminin » (1965), « Salon du Dessin et de la Peinture à l’eau » (de 1965 à 1972), « Comparaisons » (1976), et plusieurs de ses œuvres furent à nouveau acquises par l’Etat et la Ville de Paris. De son vivant, ses deux dernières expositions individuelles eurent lieu au Café Procope (1975), et aux Cimaises Ventadour, un an avant sa disparition le 4 août 1979 dans sa ville de prédilection, Paris.
Aussi, est-ce dans la capitale que deux hommages importants lui ont été rendus, l’un en 1981, présentant l’ensemble de l’œuvre graphique à la Galerie Hérouet, rue des Francs-Bourgeois, et le second en 1983 au Musée Carnavalet, « Paris disparu », à l’occasion d’une donation de 40 dessins. Un texte du Conservateur en chef de ce musée, Bernard de Montgolfier, un article d’Olivier Schmitt dans le « Le Monde » (24-07-1983), un autre d’ Edmée Santy dans le « Le Provençal » (24-08-1983) ont donné acte qu’Odette Camp était une artiste authentique, à part entière. A l’écart des modes, son art intemporel du dessin en fait une figure singulière et attachante de l’Ecole de Paris.
L’année 2009, centenaire de la naissance d’Odette CAMP et trentième anniversaire de sa disparition, offre l’opportunité d’une meilleure, d’une juste appréciation de la valeur de son oeuvre.